08 juillet 2006
la plainte des plus humbles éléments du moi
[…] la longue résistance désespérée et quotidienne à la mort fragmentaire et successive telle qu'elle s'insère dans toute la durée de notre vie, détachant de nous à chaque moment des lambeaux de nous-mêmes sur la mortification desquels des cellules nouvelles multiplieront. Et pour une nature nerveuse comme était la mienne (c'est-à-dire chez qui les intermédiaires, les nerfs, remplissent mal leurs fonctions, n'arrêtent pas dans sa route vers la conscience, mais y laissent au contraire parvenir, distincte, épuisante, innombrable et douloureuse, la plainte des plus humbles éléments du moi qui vont disparaître), l'anxieuse alarme que j'éprouvais sous ce plafond inconnu et trop haut n'était que la protestation d'une amitié qui survivait en moi pour un plafond familier et bas.
Marcel Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleur (À la recherche du temps perdu, Pléiade, II, p. 32)
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Commentaires
mais oui - et ainsi on tient à chacune de ces cellules, et en même temps on se résigne à leur disparition
Écrit par : brigetoun | 08 juillet 2006
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