ne pas laisser de trace
Plus tu auras réussi à écrire (si tu écris), plus éloigné tu seras de l’accomplissement du pur, fort, originel désir, celui, fondamental, de ne pas laisser de trace. Quelle satisfaction la vaudrait ? Écrivain, tu fais tout le contraire, laborieusement le contraire ! Henri Michaux, Poteaux d’angle (1971, Poésie Gallimard, p. 57)
la sottise de te montrer
Même si tu as eu la sottise de te montrer, sois tranquille, ils ne te voient pas. Henri Michaux, Poteaux d’angle (1971, Poésie Gallimard, p. 36)
si la souffrance
Si la souffrance dégageait une énergie importante, directement utilisable, quel technicien hésiterait à ordonner de la capter, et à faire construire à cet effet des installations ? Avec des mots de « progrès, de promotion, de besoin de la collectivité » il fermerait la bouche aux malheureux et recueillerait l’approbation de ceux qui à travers tout entendent [...]
les vertus du mimétisme
Dans une société de grande civilisation, il est essentiel pour la cruauté, pour la haine et la domination si elles veulent se maintenir, de se camoufler, retrouvant les vertus du mimétisme. Le camouflage en leur contraire sera le plus courant. C’est en effet par là, prétendant parler seulement au nom des autres, que le haineux [...]
quantité d'autres
La pierre n’a pas reçu en partage la respiration. Elle s’en passe. C’est à la gravitation surtout qu’elle a affaire. Toi, c’est beaucoup plus aux « autres » que tu auras affaire, à quantité d’autres. Considère en conséquence tes compagnons de séjour avec discrimination, traitant les roches d’une façon, le bois, les plantes, les vers, les microbes [...]
dessiner l’écoulement du temps
Je voulais dessiner la conscience d’exister et l’écoulement du temps. Comme on se tâte le pouls. Ou encore, en plus restreint, ce qui apparaît lorsque, le soir venu, repasse (en plus court et en sourdine) le film impressionné qui a subi le jour. Henri Michaux, « Dessiner l’écoulement du temps », Passages (1957, Gallimard, Tel, [...]
je me chiffonne
J’ai rarement rencontré dans ma vie des gens qui avaient besoin comme moi d’être regonflés à chaque instant. On ne m’invite plus dans le monde. Après une heure ou deux (où je témoigne d’une tenue au moins égale à la moyenne), voilà que je me chiffonne. Je m’affaisse, je n’y suis presque plus, mon veston [...]
en somme une infirmité
Le style, cette commodité à se camper et à camper le monde, serait l’homme ? Cette suspecte acquisition dont, à l’écrivain qui se réjouit, on fait compliment ? Son prétendu don va coller à lui, le sclérosant sourdement. Style : signe (mauvais) de la distance inchangée (mais qui eût pu, eût dû changer), la distance où à tort [...]
de continuelles interventions s'abstenir
La vie, aussi vite que tu l’utilises, s’écoule, s’en va, longue seulement à qui sait errer, paresser. À la veille de sa mort, l’homme d’action et de travail s’aperçoit – trop tard – de la naturelle longueur de la vie, de celle qu’il lui eût été possible de connaître lui aussi, si seulement il avait [...]
entassement non panoramique
Un dernier détail de Piero della Francesca pour vous remercier d’avoir continué à lire et animer par vos commentaires les lignes de fuite pendant mon absence ! Je veux voir la boîte d’albâtre mystérieuse et translucide qu’y tient Marie-Madeleine comme une antidote à la déprimante « fosse à bitume » de François Bon, métaphore injustement négative pour [...]
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