voués à connaître
Nous sommes donc voués à connaître, et c’est une joie qui ne va pas sans souffrance :
La conscience est […] à l’origine du drame de la condition humaine parce qu’elle repose sur un marché que nul d’entre nous n’a jamais conclu […]. Le sentiment que nous avons de ce qui se passe est la réponse à une question que nous n’avons jamais posée et l’enjeu d’un marché faustien que nous n’aurions jamais pu passer. La nature l’a fait pour nous.
Antonio R. Damasio, Le Sentiment même de soi, p. 313
et ce d’autant que beaucoup de choses nous restent obscures, à commencer par toute une part du fonctionnement de notre propre cerveau :
L’inconscient, dans le sens étroit du mot que notre culture lui a conféré, n’est qu’une partie d’un vaste ensemble de processus et de contenus qui demeurent non conscients […] À vrai dire, la liste de ce que nous ne connaissons pas est stupéfiante. Elle inclut ainsi :
Toutes les images complètement formées dont nous ne nous préoccupons pas; toutes les configurations neuronales qui ne deviennent jamais des images ;
Toutes les dispositions que nous avons acquises au fil de l’expérience, qui restent inactives et ne se transformeront peut-être jamais en schème neuronal explicite ;
Le remodelage discret de ces dispositions et le travail de remise en réseau, qui ne sera jamais explicitement connu ;
Toute la sagesse et le savoir-faire caché que la nature a consignés dans des dispositions homéostatiques innées.
L’étendue de notre ignorance est décidément troublante.
Antonio R. Damasio, Le Sentiment même de soi, p. 230