lumière des ménines

Il y a quelques semaines j’ai passé quelques jours à Madrid, pour voir enfin en vrai quelques tableaux de prédilection : Velasquez, Durer, Bosch, Ghirlandaio, Carpaccio, etc.
Je me souviens … de l’éblouissement, de la perte des repères devant l’explosion colorée du Jardin des délices en vrai en grand … de l’air (faussement ?) confus de la classe de maternelle assise devant un Velasquez que son institutrice réprimandait pour son manque de respect envers le grand artiste … des longues plages de contemplation dans la fondation Thyssen-Bornemisza quasi déserte … du côté gore du Saturne dévorant ses enfants sapé par l’hilarité d’un jeune couple de japonais se photographiant mutuellement en train de faire semblant de dévorer leurs enfants … de cette surprenante Sainte famille si gaie et humaine du même Goya plus jeune …

et des Ménines
ce tableau de Diego Velasquez (1656) qui a fait couler tellement d’encre qu’on se demande comment oser encore en parler :  » Le temps n’épuise pas les Ménines, il les enrichit « , écrit Daniel Arasse dans On n’y voit rien.

Ce tableau qui pourtant surprend, par sa lumière particulière que les reproductions ne capturent jamais, ce tableau à la fois beaucoup plus sombre, obscur, ténébreux que je ne l’imaginais mais également intensément lumineux, irisé, radieux.
On s’est beaucoup interrogé sur le miroir au fond à gauche (qui n’en est peut-être pas un) où se reflète (mais pas selon les règles de la perspective) le couple royal : mon sentiment en face de ce tableau est qu’il est tout entier un reflet dans un miroir ? et dans ce cas où est le spectateur ? où suis-je ?
Ou peut-être cette scène est-elle la métaphore de la magie de la mémoire, pour qu’iradie ainsi en son centre cette petite princesse boudeuse et pas très belle mais si grave, comme si elle portait sur ses épaules  » l’édifice immense du souvenir  » ?