j’aime pas les autres

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C’est des gens bizarres, les autres. Vous pensez qu’ils sont comme vous. Et pas du tout. Ils sont comme les autres. J’aime pas les autres. (p. 11)

Pour moi, c’est une véritable révélation : il est plus intéressant et plus gratifiant de raconter la vie que de la vivre. Je serai écrivain.
À partir de là, après avoir bénéficié d’un mois de lecture intensive pour cause d’immobilisation forcée (il paraît que l’immobilisation forcée est à l’origine de la plupart des vocations d’écrivain), je vais prendre doucement l’habitude de me promener en touriste dans ma propre vie. Cela me jouera plus d’un mauvais tour. Mais je parviendrai presque toujours à en tirer quelque plaisir a posteriori, par une habile transmutation des choses et des êtres, y compris de l’auteur lui-même. (p. 38-39)

C’est tout les autres, ça. Jamais complètement d’accord avec vous. Toujours à s’efforcer de penser le contraire de ce que vous pensez. Par pure bêtise, si vous voulez mon avis. (p. 46-47)

Les autres ne se mettent jamais à la place des autres. (p. 77)

À la Grande École, je ne fus pas toujours très à l’aise non plus. Toutes les grandes écoles ont aussi un côté petite école. La vie en général pareillement, d’ailleurs. Encore aujourd’hui, j’ai l’impression de n’être jamais vraiment sorti de la petite école. Et les professeurs ne sont pas toujours à votre goût, les élèves non plus. Les filles continuent à se comporter de manière étrange. (p. 79)

Le service militaire, c’est que des autres. (p. 91)

Surtout pas devenir monarque ou président. Il faut être le dernier des crétins assoiffé de pouvoir et de falbalas pour postuler à de telles responsabilités. Le seul bon président serait quelqu’un qui ne voudrait pour rien au monde devenir président. Encore faudrait-il réussir à le convaincre. (p. 122)

Jacques A. Bertrand, J’aime pas les autres (Julliard, 2007)

Entre légèreté et gravité, entre roman d’apprentissage et récit autobiographique, l’auteur de Tristesse de la Balance, se veut « funambul(e) sans balancier, sur la corde de la coincidentia oppositorum » (p. 77).

Jacques A. Bertrand est né en 1946 à Annonay, en Ardèche, où il vit ; il est l’un des « Papous dans la tête » de l’excellente émission de Françoise Treussard sur France-Culture, dont les archives sont disponibles en ligne.