une femme puissante
Par cgat le dimanche 1 novembre 2009, 18:29 - écrivains - Lien permanent
De telle sorte qu’elle avait toujours eu conscience d’être unique en tant que personne et, d’une certaine façon indémontrable mais non contestable, qu'on ne pouvait la remplacer, elle Khady Demba, exactement, quand bien même ses parents n'avaient pas voulu d'elle auprès d'eux et sa grand-mère ne l'avait recueillie que par obligation - quand bien même nul être sur terre n'avait besoin ni envie qu'elle fût là.
Elle avait été satisfaite d'être Khady, il n'y avait eu nul interstice dubitatif entre elle et l'implacable réalité du personnage de Khady Demba.
Il lui était même arrivé de se sentir fière d'être Khady car, avait-elle songé souvent avec éblouissement, les enfants dont la vie semblait joyeuse, qui mangeaient chaque jour leur bonne part de poulet ou de poisson et qui portaient à l'école des vêtements sans taches ni déchirures, ces enfants-là n'étaient pas plus humains que Khady Demba qui n'avait pourtant, elle, qu'une infime portion de bonne vie.Marie NDiaye, Trois femmes puissantes (Gallimard, 2009, p. 253-254)
Quel que soit le livre qu'éliront demain les jurés du Prix Goncourt, ce sera cette année, une fois n'est pas coutume, un bon livre. Je n'ai pas encore lu La Vérité sur Marie (Minuit) de Jean-Philippe Toussaint, qui attends sagement sur une de mes étagères, mais je lui fais confiance pour avoir lu (presque) tous ses autres livres. J'ai aimé Des hommes (Minuit) de Laurent Mauvignier et Les heures souterraines (Lattès) de Delphine de Vigan.
Mais, même si ma voix n'a aucune importance, c'est pour Marie NDiaye que je vote, pour ce livre magnifique d'humanité et de maîtrise du style, et aussi pour l'ensemble de l'œuvre de cette femme puissante.
::: Marie NDiaye :
« Je ne veux plus que la magie soit une ficelle ». Propos recueillis
par Nathalie Crom (Télérama, 23 août 2009)
:::
Entretien vidéo avec Sylvain Bourmeau (juillet 2009)
::: Interlignes : Bio-bibliographie et
vidéos (octobre 2009)
::: Auteurs.contemporain.info : Bibliographie
critique
::: « En visite chez Marie
Ndiaye » (Remue.net, 2004)
:::
« Marie NDiaye goncourtisée » (Carnets de JLK, 31 octobre 2009)
Commentaires
Mais si, la preuve est faite : votre voix a de l'importance.
C'est la petite dame qui a quitté la France après les élections de 2007 ? On la célébre le jour du lancement du débat sur l'identité nationale ...????
Vivement des éclaircissements bessonniens !
@PhA : peut-être bien, finalement (on peut rêver ) !
@Bobo : bien vu !.. d'autant qu'elle se permet d'oser qualifier de "femme puissante" une jeune africaine clandestine !
et en parlant d'identité nationale, je viens de l'entendre décrire sur France info comme "romancière d'origine sénégalaise" (!!) : ça doit l'énerver
C'est tellement commode, une étiquette sur l'origine, appellation contrôlée, surtout quand "ça se voit". Tiens, moi, je suis d'origine antillaise, mais "ça ne se voit pas". Parfois on s'en étonne, ça m'énerve aussi. Enfin, pas longtemps.
J'ai trouvé ce livre un peu décevant en fin de compte. L'écriture est vivante certes mais je suis resté sur ma fin m'attendant à ce que les trois destins se croisent (on a l'impression que l'auteur nous y mène mais ça n'arrive jamais)..
..et la touche de fantastique, pourquoi pas mais on ne voit pas trop à quoi elle sert ici.
Mais de belles pages quand même (et ma préférence va au récit mettant en scène Rudy Descas...je lui ai trouvé des accents djianesques).
sur ma faim -)))
Moi, c'est Mauvignier, et encore Mauvignier. Mais le Marie N'Diaye, même s'il ne vaut pas ROsie Carpe, mérite d'être distingué.
Moi, c'est Mauvignier, et encore Mauvignier. Mais le Marie N'Diaye, même s'il ne vaut pas ROsie Carpe, mérite d'être distingué.
Moi, c'est Mauvignier, et encore Mauvignier. Mais le Marie N'Diaye, même s'il ne vaut pas ROsie Carpe, mérite d'être distingué.
Moi, c'est Mauvignier, et encore Mauvignier. Mais le Marie N'Diaye, même s'il ne vaut pas ROsie Carpe, mérite d'être distingué.
Répétition indépendante de ma volonté. Voyons si ça marche du premier coup.
J'ai été très secouée par Des hommes et j'attaque Trois femmes puissantes. Il me semble qu'élire le Mauvignier aurait eu un effet de salubrité mentale pour une nation qui a laissé mariner sous une chape de silence des hommes qui ont vécu des choses indicibles et auxquels Mauvignier prête magnifiquement des mots et un registre très puissant.
En tout cas, elle vient de se faire un nouvel ami (si elle est sur Facebook) en la personne du député UMP Eric Raoult qui, réagissant à retardement à une de ses interviews, interroge le ministre de la Culture et de la communication pour savoir si elle ne doit pas être soumise, comme d'autres écrivains (passés ou futurs) ayant obtenu le prix Goncourt, à "un devoir de réserve" qui sierait à sa distinction.
Ach ! Quand chentends parler de Kultur...
... l'invention du "devoir de réserve" pour les écrivains ! ils nous auront tout fait !
Pour ceux qui n'auraient pas suivi le débat sur Facebook :
- le premier article sur la question dans BibliObs
http://bibliobs.nouvelobs.com/20091...
- et les réactions de Claro :
http://towardgrace.blogspot.com/200...
ou Roland C. Wagner :
http://generationscience-fiction.ha...
(parmi tant d'autres)