pas né pour qu’on me force
Par cgat le dimanche 27 mai 2007, 01:28 - citations - Lien permanent
De grand coeur, j’accepte la devise : « Le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins » et j’aimerais la voir suivie de manière plus rapide et plus systématique. Poussée à fond, elle se ramène à ceci auquel je crois également : « que le gouvernement le meilleur est celui qui ne gouverne pas du tout » et lorsque les hommes y seront préparés, ce sera le genre de gouvernement qu’ils auront. (...)
Ainsi l’État n’affronte jamais délibérément le sens intellectuel et moral d’un homme, mais uniquement son être physique, ses sens. Il ne dispose contre nous ni d’un esprit ni d’une dignité supérieurs, mais de la seule supériorité physique. Je ne suis pas né pour qu’on me force. Je veux respirer à ma guise. Voyons qui l’emportera. Quelle force dans la multitude ? Seuls peuvent me forcer ceux qui obéissent à une loi supérieure à la mienne. Ceux-là me forcent à leur ressembler. Je n’ai pas entendu dire que des hommes aient été forcés de vivre comme ceci ou comme cela par des masses humaines - que signifierait ce genre de vie ? Lorsque je rencontre un gouvernement qui me dit : « La bourse ou la vie », pourquoi me hâterais-je de lui donner ma bourse ? Il est peut-être dans une passe difficile, aux abois ; qu’y puis-je ? Il n’a qu’à s’aider lui-même, comme moi. Pas la peine de pleurnicher. Je ne suis pas responsable du bon fonctionnement de la machine sociale. Je ne suis pas le fils de l’ingénieur. Je m’aperçois que si un gland et une châtaigne tombent côte à côte, l’un ne reste pas inerte pour céder la place à l’autre ; tous deux obéissent à leurs propres lois, germent, croissent et prospèrent de leur mieux, jusqu’au jour où l’un, peut-être, étendra son ombre sur l’autre et l’étouffera. Si une plante ne peut vivre selon sa nature, elle dépérit ; un homme de même.
Henri David Thoreau, La désobéissance civile (1849)
Dans la Revue des ressources encore, on peut lire dans son intégralité ce texte, la première partie ici, la deuxième partie là. On y trouve également de beaux extraits de son Journal.
L'esprit commercial des temps modernes... est la réédition par les éditions Le Grand Souffle d'un très court texte écrit en 1837 par David Henry Thoreau. On peut déjà y lire :
L'ordre des choses devrait plutôt être inversé - le dimanche devrait être le jour du labeur de l'homme, pour ainsi gagner sa vie à la sueur de son front ; et les six autres jours consisteraient en le repos des sentiments et de l'âme, - pour parcourir ce jardin ouvert, et boire aux doux effluves et aux sublimes révélations de la nature. (p. 30)
Commentaires
instinctivement je ne peux être en accord avec Thoreau sur la première partie. Ce qui me gêne toujours quand je vois des alters se revendiquer de lui, je me demande s'ils n'ont pas eu une lecture sélective.
Bien sûr instinctivement je serais d'accord pour la seconde (avec un problème : se trouver devant des portes fermées)
l'une des seules promesses du président qui m'ait fait envie est l'ouverture des portes le dimanche : sera-t-elle tenue ?
quant à Thoreau, même si sa réflexion exerce sur moi une séduction certaine, je ne suis pas complètement d'accord avec lui non plus ... et surtout je ne suis absolument pas prête comme lui à aller vivre dans les bois !
là où je vous suis complètement, c'est sur le fait que la plupart de ceux qui se réclament de la "désobéissance civile" de Thoreau ne l'on jamais lue : j'ai d'ailleurs mis ce post en ligne à la suite d'une discussion avec des amis, à qui j'avais signalé que le texte était disponible en ligne (sur plusieurs sites, d'ailleurs) s'ils voulaient s'en faire une idée plus précise et moins romantique
et puis avoir lu ce genre de texte ne peux pas nuire, il me semble, surtout par les temps qui courent (c'est affreux je n'arrive plus à utiliser cette expression, que j'aime bien pourtant, sans aussitôt visualiser notre président sautillant ridiculement en nike!)