je vais être vierge
Par cgat le mardi 3 juin 2008, 01:10 - écrivains - Lien permanent
Je me marie aujourd’hui. L’imam n’a que deux femmes et il a aimé mes yeux verts. En plus il fait une bonne action. Le seul problème c’est que je ne suis pas vierge et que sa mère veut voir le drap. (…)
Les belles-mères d'ici veulent des esclaves pour leurs fistons, qu'elles ont élevés comme des petits rois. Et surtout elles veulent se venger sur nous les belles-filles de leurs propres belles-mères, qui les ont fait chier toute leur vie aussi. Elles éduquent leurs fils comme des machos et leurs filles comme des bonniches. Tant mieux si son mari lui a mis des beignes, c'est la faute des mères tout ça. C'est un cercle sans fin. Je vais la baiser. Moi je ne suis pas une bonniche, je suis une pute. Elle va voir.
Bon, c'est l'heure, je dois aller coucher avec mon mari. Je suis aux toilettes, je me taillade l'avant-bras, fais couler le sang dans un petit sachet en plastique et mets un pansement. Je vais être vierge.
J'entre dans la chambre, mon immonde mari est sous les draps et ma connasse de belle-mère nous observe par le coin de la fenêtre. Elle croit que je ne la vois pas. Je baisse les stores sur sa gueule, j'espère lui avoir cassé le nez. Je fais semblant d'être un peu gênée, je prends mon temps pour me déshabiller, genre j'ai pas l'habitude, et je respire bruyamment. Il me caresse la tête pour que je me calme.
Ça marche. Il bande. J'ai un réflexe mais je m'arrête vite. J'allais mettre de la salive dans ma chatte, sauf que je ne suis pas censée savoir qu'on fait comme ça. J'ai mon petit sachet dans la main, je le presse fort au moment de la pénétration. C'est bon, je suis vierge. Et maintenant, j'ai un toit. C'est fini, mon mari se rhabille. Moi aussi. Et sa mère frappe à la porte pour récupérer le drap avec la tache de sang et youyouter dans toute la baraque avec ses copines. Salopes aussi.
You you, you you !Saphia Azzeddine, Confidences à Allah (Léo Scheer, 2008, p. 123-125)
Ce monologue à l'adresse d'Allah d'une jeune femme libre en dépit d'un parcours désespérant est un écho finalement rafraîchissant à l'un des multiples sujets d'accablement dans la réalité politique et sociale de notre beau pays.
post-scriptum : un écho d'Entre les murs chez Berlol
Commentaires
dans le cas qui est sur le devant de la scène :
- la jeune femme a été plus confiante dans la "mansuétude" du mari (je ne veux pas croire qu'elle a volontairement voulu l'humiliation pour éviter ce mariage)
- lui était un converti, "race" spécialement intransigeante, tout orienté vers son salut, au besoin au dépent des autres
Ce qu'il faudrait c'est prévoir que ce ne puisse pas être une cause d'annulation. Resterai le sort à l'intérieur du couple (et dans ma jeunesse c'était moins manifeste, pas le drap, mais pesant tout de même)
où l'on voit que trop de femmes sont encore obligées de biaiser (!), louvoyer, mentir. Ce qui, ceci dit, stimule sacrément l'imagination...
Oui vigoureusement et violemment rafraîchissant...
C'est ce qu'il faut pour faire pièce à cette lamentable histoire dont je n'ai pu moi non plus éviter de faire un billet tant elle m'a scandalisée.
Et merci encore, Cgat, veilleuse émérite,pour tous ces textes peu connus et pleins de sens que tu nous fais découvrir de billets en billets.
Rachida Dati parle Dior.
Le bon texte au bon moment. C'est bien. Tout est dit. Hélas !
merci à tous, et bienvenue Georges F.
Dior (sous la forme d'une valise rose à roulettes tombée d'un bus de touristes) joue un rôle important dans le roman ... quand à la ministre qui aime en porter (joli le jeu de mots, Dominique! et "biaiser" n'est pas mal non plus, juliette), je la trouve presque émouvante quand elle s'emmêle les pinceaux dans son histoire personnelle
Bel à-propos, chère Christine !
Par ailleurs, je ne suis pas certain que la jeune femme qui souhaitait l'annulation plutôt que le divorce, si possible dans la discrétion, soit heureuse du raffut et des dérives provoqués par divers "soutiens" — sincères ou opportunistes.
Réjouissons-nous toutefois du râteau qu'une ministre met sur son propre chemin.
Émouvante ? Ah non, alors. Épouvante ou éprouvante, si tu veux, oui !
... qui souhaitait le divorce plutôt que l'annulation, non ?
Au temps pour moi...
tout est toujours plus compliqué ...
je ne suis pas loin de penser que cette affaire est un leurre, comme l'expliquait fort bien Rachida Khalil hier soir chez Taddéï
http://ce-soir-ou-jamais.france3.fr...
en même temps, comme Régis Jauffret dans la même émission (toujours excellent dans l'indignation sur-jouée!), je trouve totalement inadmissible et accablant que la virginité des femmes redevienne un sujet de débat dans la France décidément très moisie du 21e siècle
concernant la garde des sceaux :
- elle n'a hélas pas totalement tort concernant la politique socialiste de la banlieue ...
- il me semble qu'il y a assez de reproches politiques à lui faire sans aller chercher des procès qu'on ne fait qu'aux femmes politiques (incompétence, frivolité, émotivité, courtisanerie, etc. etc.) et qui me donnent furieusement envie de la défendre, même si au départ elle ne m'est pas très sympathique, comme en leur temps Edith, Ségolène et quelques autres
Bonjour, par Olivier je lis ça. J'ai fait 4 articles sur le sujet. Je suis une "vieille" née en 41. Moi c'est coté catho que j'ai vécu ça, alors leurs histoires de religions Islam me font ch... l'Islam toujours l'Islam, ça frise le racisme pour moi.
Tadei et ses invités toujours à la hauteur
la ministre ? à côté de la plaque pour moi, elle fait comme le président mélange de la vie privé/vie publique. Je suis contre l'annulation, zont qu'à divorcer comme tout le monde.
Je me cite du 29/05 "Compassion pour la fille qui a subit cette injure, cette humiliation de la part de la famille chez qui elle croyait pouvoir entrer en confiance, de la part de l’homme qu’elle croyait aimer, avec qui elle avait fait le projet de faire sa vie et construire une famille… elle n’a rien, mais vraiment rien perdu, ils se sont révélés à temps, elle aurait eu une vie d’enfer."
merci pour ce témoignage, Annie !
je mesure ma chance d'avoir appartenu à une génération et à un milieu où l'hymen n'était pas un problème, s'effaçait sans même se manifester grâce aux tampons, et où la virginité posait plutôt un problème inverse : comment s'en débarrasser assez vite pour ne pas avoir l'air cruche ?
c'est la raison pour laquelle j'ai beaucoup de mal à accepter que dans mon pays cela redevienne une angoisse et une humiliation pour les jeunes femmes .. et ce coté catho (comme vous l'écrivez joliment) aussi!
rien à voir, mais connaissez-vous ce blog à explorer, christine ?
http://travailetcreation.over-blog....
merci pour ce lien, qui a l'air intéressant, jean-françois !