en petits ruisseaux sur des écrans ou des feuilles
Par cgat le mardi 17 février 2009, 00:40 - écrivains - Lien permanent
49.1
Criture.
Certains tentent de préserver leurs paroles en les transformant en traces liquides qu'ils font couler en petits ruisseaux sur des écrans ou des feuilles.49.2
Les feuilles ne sont pas vertes mais blanches. Le liquide sèche en séchant.49.3
Parfois ils font un paquet de ces feuilles, qu'ils assemblent en objets durs-mous, sur lesquels les autres peuvent s'asseoir.
(Voir ci-autour.)(…)
49.19
Dans l'écriture on lisse et on relisse les mots avec une plume, jusqu'à ce que la pensée glisse parfaitement.49.20
Dans l'écriture on touche et on retouche les mots au moyen d'une souris, jusqu'à ce que la pensée se couche. Parfaitement !49.21
Dans la belle histoire de la page blanche, ce n'est pas la page qui est vide, ni le cerveau qui flanche, clic, c'est le trou plein qui ne sait où aller.49.22
Idem écran plat, écran noir, cerveau-planche.49.23
Vois l'œil du lecteur qui se glisse sous les mots et glisse à son tour sur la pensée lissée.49.24
Glisse sur feuilles, plage, virginité, cristaux liquides.49.25
En dépit des efforts paranoïaques des crivains pour protéger les mots de l'usure, ceux-ci se roulent à leur gré dans les louches, sur les écrans, se déformant et s'érodant par tous les bouts.49.26
En usant des mots, on les use par la tête, et la queue.
Jacques Rebotier, description de l’omme (Verticales, 2008, p. 357-361)
post-scriptum : pour se faire une idée plus précise avant de courir l'acheter, la table et quelques extraits avaient été publiés sur le site d'inventaire/invention.
Commentaires
est arrivé à franchir migraine pour intelligent (je crois) plaisir
j'aime beaucoup
La semaine dernière, après en avoir lu des extraits bidonnants là : http://www.inventaire-invention.com... , je suis allé dans ma pas préférée librairie le chercher. Je l'ai parcouru, gros volume quand même, et pas donné. Et puis l'étagère au-dessus mes yeux sont tombés sur Les ombres errantes de Quignard, que j'ai finalement choisi. Mais j'y retournerai.
c'est un gros et beau livre ! très drôle et très intelligent !
vous avez raison de me rappeler que j'ai oublié de remettre un lien vers les extraits chez inventaire/invention, dont j'avais déjà parlé
Quel régal ! L'" article " 49.3, précisément parce que c'est le 49.3, n'en est que plus savoureux.
extrait aussi sur tiers livre il y a quelques semaines
http://www.tierslivre.net/spip/spip...
je constate sans m'étonner qu'on n'a pas choisi le même extrait, tant mieux!
Un livre dont la criture est imbittable. Les lois de l'ortographe y sont défiées (et parfois aussi bafouées, mais celà ne reste qu'un point de vue, certes défendable, mais hors de propos)Comme Francis Lacassin le disait, le bomberyx ne trempe pas deux fois son bec dans la même encre, même s'il fait parfois deux petites pattes arrières. Heureusement les préceptes du CPAV sont toujours en vigueur, sous la férule du Comte Fantastique, qui nous a récemment rappelé une maxime qu'il est bon de garder à l'esprit :
Qui gaine avec sévérité de jolies rondeurs dans un pantalon vynile, Arrose de belle véracité, ses airs sans coeur, d'une pluie d'argile...