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Je ne fais pas le poids.
Naître fille : persécutée opprimée par mes parents, violée tuée par des passants.
Plus tard, je veux être un garçon, un homme.
Je le clame haut et fort : « Une femme amoureuse devient bête, perd la tête, est une machine molle. »
Femmes archétypales : celle qui au chômage vit des aides de l’État, pond des enfants ; celle qui avec un petit boulot cherche le soutien des hommes, rit à toutes leurs blagues ; celle qui est déjà morte.
« Comment dois-je agir pour échapper à ces images ? Je ne veux pas être une serpillière.
- Tu ne seras jamais une serpillière. »
Les femmes des tropiques, leur sang chaud, leur rythme dans la peau.
« Je refuse d’être assimilée à ces noires. »
Ça ne l’étonne même pas. (p. 43)

Le temps n'est pas cette belle chose linéaire : il est cyclique et devant moi vient fréquemment se casser la gueule la première : il appartient à quiconque se baisse pour le ramasser.
La face de traviole, à une encablure de l'autre côté à l'autre bout du monde, ces quelques centimètres.
Politisation. Falsification. Enseigner l'histoire. Ce qu'on apprend aux vaincus. Spasmes. Je me tourne vers la doite. Le cerveau fixe, le reste du corps, sa giration autour de cet axe. (p. 143)

Béatrice Rilos, Is this love (Le mot et le reste, 2009)

Pour prolonger la déplorable « journée de la femme », un très beau livre qui tente, de réécriture en réitérations, de réinventer ce que c’est qu’être femme et être noire, originaire de l’« île-de-France » et des Antilles.

Béatrice Rilos est née en 1979 ; elle est aussi plasticienne et a publié :
- Enfin on fera silence (Seuil, « Déplacements », 2007)
- et Ou les élections (publie.net, 2009)

Elle est également l’auteur d’un beau blog : erratique