l'analogie donne du sens
Par cgat le jeudi 16 avril 2009, 02:45 - écrivains - Lien permanent
Bonjour Aston,
J'ai fait l'essai avec le codage symbolique de Fourier. Tout à fait étonnant. Il y a une interface visuelle, bien sûr. J'ai obtenu des fractales assez surprenantes, la densité des grains de sable s'exprime directement sous forme d'une mesure géométrique, et la granularité correspond à des niveaux de gris. J'aimerais bien que tu le testes aussi. Si ça te paraît intéressant, je pense pouvoir y ajouter la couleur. Ce serait parfait pour traduire la composition chimique. En fait, c'est plutôt joli, dans le genre froid et sophistiqué.La réponse se fit un peu attendre, Aston n'était pas encore prêt, Lulu avait mal évalué sa disponibilité. Ou bien il réfléchissait à autre chose. Peut-être qu'il pensait avec Georgio, ou avec Placek. Penser avec, c'est comme ça qu'ils disaient, maintenant. Penser avec, ça ressemblait à danser avec. Quand on danse, quelquefois, on se marche sur les pieds, ou bien il y en a un qui danse à contretemps. Quand on pense en se décalant, ça doit faire comme des dissonances. Elle raisonnait toujours par analogie, déformation professionnelle sans doute. L'analogie permet de percevoir ce qu'on est incapable de percevoir sous forme brute. L'analogie donne du sens. Elle produit des représentations qui parlent, aux yeux, au cœur et aux oreilles.
Salut Aida,
C'est bien, dis donc ! Ainsi tu peux repérer si les grains sont tassés ou pas. Il faudrait faire l'essai sur un matériau plus compressible, pour être sûr. Tu essaies la mousse de polyuréthane ? Nous on en a plein, ici. Je ferai des tests en parallèle. As-tu réfléchi au relief ? Il faut trouver une caractéristique variable selon la mesure, on l'envoie en différé sur les deux canaux optiques. Et hop ! Tu as des creux et des bosses partout où ça se décale. Je te contacte dans une heure, Placek a besoin de moi pour le déverrouillage des filtres. Il pue de colère parce qu'il n’y arrive pas tout seul. Ça urge ;-)Elle ne déconnecta pas tout de suite. Le relief, bien sûr, elle y avait déjà pensé. La mousse de polyuréthane expansé : intéressant ! Elle tenta d'imaginer les découpes et les volutes que l'interface permettrait de visualiser. Mais en fait, elle essayait surtout d'imaginer ce que c'était de ressentir la colère de quelqu'un. Une émotion violente chez l'autre provoquait habituellement des nausées chez un télépathe. Malaises, vertiges, sueurs froides, auxquels le cerveau cherchait une explication rationnelle : il suggérait alors des odeurs déplaisantes, des sensations visqueuses ou glaciales, des goûts amers ou métalliques... Le corps souffrait, l'effet suggérait la cause.
Sylvie Lainé, « Définissez - priorités » (2000), Espaces insécables (actuSF, 2008)
Sylvie lainé est née en 1957.
Ces nouvelles ont auparavant été publiées en revues, depuis 1985.
Elle a aussi publié, chez actuSF, un autre recueil : Le Miroir aux
Eperluettes.
en ligne :
::: un entretien
vidéo
::: la préface de
Catherine Dufour, à laquelle je souscrit entièrement
::: et
un article de Jean-Claude Vantroyen (Le Soir, 3 avril 2009)
ActuSF, c’est un site internet très vivant, mais c’est aussi une collection baptisée « les 3 souhaits » : des petits livres très jolis, à tirage limité, avec de belles couvertures (celle-ci est due à Gilles Francescano) ... et surtout de bons auteurs.
Commentaires
le genre de livres qui pourrait me réconcilier avec la sf, non pas que je sois fâchée, seulement séparée de qq années, lesquelles années furent remplies de plein d'autres choses, alors qu'avant, il n'y avait que la sf...
je viens d'aller voir la video, cette fille me ressemble sur certains points ! je m'en vais commander ses livres...merci pour toute cette veille utile des mots