un sportif de haut niveau
Par cgat le dimanche 10 août 2008, 00:10 - écrivains - Lien permanent
Dès sa naissance, Louis Lanher place la barre très haut. Sorti du ventre de sa mère le 6 novembre 1976 à 7h30, il est d'emblée pourvu du signe astrologique le plus puissant : Scorpion ascendant Scorpion. Double dose de créativité et de sexualité, un avenir héroïque s'ouvre à lui. S'il était Vierge ascendant Poisson ou Verseau ascendant Capricorne, croyez bien que Louis Lanher ne se permettrait pas de publier une autobiographie. Comme le reste de l'humanité, il serait boulanger ou expert-comptable. Mais les astres en ont décidé autrement.
Ce 6 novembre 1976, Louis Lanher est déjà très beau. Ses trois kilos huit cent cinquante résonnent dans la maternité. On lui apporte un sein, des biberons, une bavette, Louis Lanher n'en a que faire. Il tend ses grosses paluches vers le décolleté de l'infirmière et lui emprunte son stylo. D'instinct, il rédige sur-le-champ la première phrase de cette autobiographie : « Je m'appelle Louis Lanher. » Accrocheuse, minimaliste, parfaitement envoyée, cette entame relègue aux oubliettes le reste de la production littéraire contemporaine. L'Auteur est né.
Ne lui reste plus qu'à dérouler. (p. 13)Un romancier est avant tout un sportif de haut niveau. Il en faut de l'entraînement pour se lever tous les matins à 14 h 30, traverser fièrement son pâté de maisons jusqu'à la maison de la presse, acheter sans hésitation le magazine du jour (lundi : Voici, mardi : Les Inrocks, mercredi : VSD, jeudi : Le Nouvel Obs, vendredi : RTT-décompression, samedi : Le Monde 2, dimanche : Le journal du dimanche, si, si), choisir une terrasse de café orientée sud-ouest, décortiquer toutes ces sources d'inspiration universelle, puis, exténué, repu, empli d'un sentiment inégalable de devoir accompli, rentrer chez soi pour écrire toute la nuit un début de nouveau roman fortement inspiré par les photos de vacances de Claire Chazal.
Il est 18 h 30, un chef d'oeuvre est sur le point de naître, je le sens picoter au bout de mes doigts comme un bouton d'herpès qui refuserait de sortir (c'est aussi ça la force du romancier, trouver des métaphores vraiment classe).
Il est 18 h 31 donc, j'ouvre fébrilement mon ordinateur portable, caresse la souris d'un doigt humide (le romancier se lave toujours les mains après être allé aux toilettes), et remonte le long des icônes jusqu'au point G. Google. Je dois trouver des noms de plages, des parfums de beignets, des marques de bikini, des formules de crèmes solaires qui pénètrent bien la peau, de quoi placer le décor de ma page 1 que j'intitule sobrement : La Possibilité d'une île de sable ou Plateforme à marée basse. J'aime les noms qui claquent, surtout quand c'est moi qui les invente. (p. 119-120)
Louis Lanher, Ma vie avec Louis Lanher : nouvelles (Au Diable Vauvert, 2008)
Louis Lanher est né en 1977, mais, comme son narrateur, Il « passe à la
télé » ; il a publié :
- Microclimat (Au Diable Vauvert, 2002)
- Un pur roman (Au
Diable Vauvert, 2004)
On peut lire en ligne les avis de :
- Thomas
Clément
- Frédéric
Vignale
- ActuaLitté
Commentaires
perplexe :citations tentantes - avis de Thomas Clément dissuasif par sa façon d'aimer - les deux autres : impression : pourquoi pas si on s'ennuie légèrement
Les Lignes de fuite, dans leur admirable objectivité, nous entraînent aujourd'hui aux confins de la littérature...
Bon. Un livre encensé par Thomas Clément, déjà, ça fait froid dans le dos... Et puis, ayant fait le tour des liens : foi de Scorpion ascendant Scorpion, ce type concentre tout ce que je déteste. Mais à quoi bon l'envoyer au diable ? Il y est déjà...
je préfère ne rien dire
pour être honnête, j'ai surtout eu envie de le citer pour la comparaison avec un "sportif de haut niveau", qui prolongeait mon propos d'hier, mais je ne suis pas totalement convaincue ; reste que certaines nouvelles sont très drôles (par exemple celle intitulée "Un voyou sarkozyste en milieu artistique" sur l'Homo Erectus Artistique) : une lecture agréable et rafraîchissante, donc, sans plus
quant aux "confins de la littérature", je me fais un devoir et un plaisir de les explorer : c'est mon côté "where no one has gone before" (Star trek pour ceux qui ne connaissent pas!)
Je ne sais pas comment on le dit en klingon mais : bien entendu, chère c., et ce devoir est aussi notre plaisir...
...quant à "comme un bouton d'herpès", ce n'est pas une métaphore mais une toute bête comparaison, comme chacun (sauf l'auteur) sait...
eh, Dominique, nous les zeugmes et tout ça c'est trop notre taf - mais que ce mec écrive pas comme toi, tu diras pas le contraire ! la littérature c'est de la bonne boulangerie, d'où le fait qu'on n'a pas tous rejoint la webmaster sur ce coup-là!
en tout cas, rien de tel pour réveiller les commentateurs endormis !
eh oui, François, mais (sans vouloir abuser de l'homéotéleute) j'ai l'air de quoi, maintenant, à arriver là avec cette allure austère et pincée d'instit 3e république et mon coup de règle tatillon sur les doigts, alors que les autres fois je lis et me tiens coi !
et au passage, merci, cgat, d'être une lectrice infatigable et supersonique & blogueuse de même : pour les lecteurs lents comme bibi, c'est une mine, ces pages.
ah non alors, j'étais super content de te voir débouler dans nos plate-bandes des papoteurs du web : si j'ai réagi c'était justement pour te le dire... et question instit 3ème république toi tu serais plutôt de la 9ème... quoi, tu vas pas te toi coi ? (et merci pour l'homotoléteute)
merci dominique ! même si "supersonique" appliqué à ma lente et très fatigable petite personne me laisse infiniment songeuse ...
surtout ne vous tenez pas coi et revenez quand vous voulez donner si ça vous chante des coups de règle sur les doigts ; je ne sens pas les miens visés : ça fait un bail que j'ai décidé que je n'étais plus à l'école !