quelques lignes du temps d'avant
Par cgat le mercredi 10 décembre 2008, 02:28 - citations - Lien permanent
Ce cahier parce que je sens que s'effacent, à peine posées, les touches légères qui confèrent aux heures de notre vie leur saveur, leur couleur, il ne subsiste plus, avec l'éloignement, que des blocs de quatre ou cinq années teintés grossièrement dans la masse. J'aimerais bien avoir conservé quelques lignes du temps d'avant - d'avant la conscience du monde et de soi, de la fièvre et de l'urgence, de la certitude de mourir. Mais c'est parce qu'elles m'étaient épargnées que je n'ai pas éprouvé le besoin de rien noter.
Pierre Bergounioux, mardi 16 décembre 1980 (première entrée), Carnet de notes 1980-1990 (Verdier, 2006, p. 7)
Commentaires
pas souvenir d'avoir déjà lu du Bergounioux ici (mais peut-être que je me trompe) en tout cas ça me fait drôlement plaisir pour commencer la journée : on se sent bien accompagné
Merci, car ce texte est tout simplement magnifique. C'est vrai qu'il faut lire et re-lire Bergounioux; c'est un grand !
je remets mon nez une fois par semaine en gros dans les carnets (assez gros pour y trouver toujours plaisir, parfois agacement, et juste après admiration)
Et complexes devant tant de lessives étendues
vous avez raison, c'est bien (vérification faite) la première fois que je cite Bergounioux, ce n'est pas faute d'aimer ce qu'il écrit, mais je suis souvent accaparée par les nouveautés ...
les carnets sont en effet un peu agaçants dans la répétition (des lessives et d'autres choses ; les levers très matinaux, qui me laissent pantoise) mais c'est le lot commun des journaux intimes lus en continu sur le papier : les blogs ont la grande vertu de restituer au journal son rythme quotidien
J'ai vu qu'Argol ressort ses entretiens avec son frère, Gabriel Bergounioux (que j'aime beaucoup aussi). Une lecture qui me tente.
PhA : je viens de les acheter, ils sont dans mon sac, j'ai demandé à la libraire "les entretiens des frères Bergounioux", elle a souri
et quant aux répétitions dans les carnets : moi je ne m'en lasse pas, il peut faire la lessive tous les jours et l'écrire si ça lui chante, je n'éprouverai jamais l'ombre d'un soupçon de début d'agacement...
Une libraire de bon goût...
Les frères Bergounioux, justement, oui ; cette question de la fraternité (qui dans leur écriture n'est pas une ressemblance) m'intéresse. (J'aime bien les frères, de manière générale - et ce matin, coïncidence ? mes petits élèves ont réfléchi sur "les deux frères", des frères Grimm.)
Philippe, as-tu lu "Frère du précédent" de J-B Pontalis ? Il évoque justement la fratrie, et pas que la sienne.
Quant à Pierre Bergounioux, je n'apprécie pas ses carnets...
oh ce n"est pas les lessives qui m'agacent, je les admire presqu'autant que la discipline pour se battre avec les mots.
Non ce sont des jugements à l'emporte pièce, parce que je crois que j'aurais les mêmes, et d'ailleurs il y a toujours quelques lignes plus loin une générosité
Pas lu, Pascale ; merci pour la piste. (Pas lu non plus les Carnets, d'ailleurs, effrayé par la masse - mais j'aime bien votre "parce que je crois que j'aurais les mêmes", Brigetoun - qui donne envie, en fait.)
Merci Brigetoun pour le commentaire 9, j'y retrouve mes propres disputes avec Bergou. Quant à cgat, se rassurer : c'est parce qu'on se couche plus tôt, c'est tout. Bizarre comme l'écriture départage ceux du soir et ceux du matin, mais la part non somniaque doit se ressembler bien quand même. Ceci dit, y en a bien d'autres dans la bibliothèque qui nous énervent autant qu'on les aime, ça doit être un peu comme les blogs.