participer au grand handicap
Par cgat le mercredi 18 juillet 2007, 00:08 - citations - Lien permanent
Aujourd'hui, chacun est contraint, sous peine d'être condamné par contumace
pour lèse-respectabilité, d'exercer une profession lucrative, et d'y faire
preuve d'un zèle proche de l'enthousiasme. La partie adverse se contente de
vivre modestement, et préfère profiter du temps ainsi gagné pour observer les
autres et prendre du bon temps, mais leurs protestations ont des accents de
bravade et de gasconnade. Il ne devrait pourtant pas en être ainsi. Cette
prétendue oisiveté, qui ne consiste pas à ne rien faire, mais à faire beaucoup
de choses qui échappent aux dogmes de la classe dominante, a tout autant voix
au chapitre que le travail. De l’avis général, la présence d’individus qui
refusent de participer au grand handicap pour gagner quelques pièces est à la
fois une insulte et un désenchantement pour ceux qui y participent.
Robert Louis Stevenson, Une apologie des oisifs (1877, Allia, 1999, p. 7-8)
Commentaires
solution : indifférence aux jugements de la classe dominante et du grans nombre, et pas uniquement quand on est oisif. Pour cela se contenter d'une certaine médiocrité quand aux signes de richesse ou puissance - et ne pas juger, sauf aggression
Excellent ! j'aime cette idée d'enthousiasme obligatoire, et, bien sûr, celle du grand handicap.
Dans le genre, Allia a déjà publié "Apologie de la paresse" de Clément Pansaers, qui voisine dans ma bibliothèque avec le pamphlet de Lafargue (Droit à la paresse).
J'ajoute personnellement: Travaillez moins pour gagner plus de temps !
Amicalement
LS
en effet ! Allia suit cette ligne de fuite là et a publié encore d'autres antidotes à la doxa actuelle : j'ai aussi dans ma bibliothèque "La Paresse comme vérité effective de l'homme" de Malevitch et"Le Paresseux" de Samuel Johnson, mais il y en peut-être encore d'autres
Ah oui j'avais oublié le Malevitch qui est aussi dans ma bibliothèque.
Oblomov mais pas chez Allia.
J'ai aussi acheté dans les années 70, paru au Seuil, un ouvrage collectif "Travailler deux heures par jour"...
on peut aussi ajouter L'art de l'oisivete de H. Hesse récemment paru en livre de poche ou encore Eloge de l'oisivete du mathématicien BERTRAND RUSSELL, également disponible chez Allia.
...et dans le même ordre d'idées, l'excellent "Bonjour paresse" de Corinne Maier", en Folio...
ben mes lézards vous faites fort ! allez je vais chercher le sous-préfet aux champs, ça en fera un de plus
pour les sous-préfets aux champs je ne suis pas sûre, car (sans entrer dans les confidences) j'en connais (assez bien) au moins un qui travaille beaucoup trop ...
mais je suis heureuse de voir que les lecteurs de ce blog ont de saines lectures et sont à même de résister au matraquage de la pensée unique !
je vous conseille aussi le "Manifeste contre le travail", que j'ai jadis cité là :
http://consciences.blogspirit.com/a...
D'un autre flemmard : "Autrefois je restais tard au lit et j'étais bien. Je fumais des cigarettes, jouissant de mon corps étendu, et je regardais par la fenêtre les branches d'arbres. Le soleil d'hiver glissait sur le toit de tuiles voisin et l'ombre s'allongeait sur le mur."
oui ... paresseux, vivant de ses rentes, se levant tard et se livrant à des vices prohibés (les cigarettes) : il va falloir bientôt penser à censurer les prix Nobel !
heureusement ce livre là est introuvable en librairie ... mais pas sur internet (et grâce à toi!)
cela m'épate toujours de voir que dès les premiers mots de "La corde raide" il y a déjà l'hommage à Proust, la fenêtre, les branches d'arbres ...
Mais certains de ces auteurs n'étaient-ils pas d'horribles travailleurs ?
Hélas, Lucien, c'est à craindre, et qui ont fait suel burnous, au Harrar ou ailleurs...
joli "suel burnous" ! il y a travail et travail, et l'exaltant programme "travailler plus pour gagner plus" ne s'applique pas vraiment à l'écriture ... sinon ça ce saurait
OUI, Lucien a raison, il y a une forme de masquage, que je dirai d'élégance, chez ceux qui travaillent beaucoup mais qui ne le montrent pas, et restent en dehors des conventions, ou des "canons" de la réussite. A l'inverse, cela souligne l'évidente vulgarité de ceux qui veulent toujours + et le/se montrer toujours + mais qui pourtant réussissent bien dans les médias parce qu'une grande partie de la population est plus "accessible" par des moyens bas que par des qualités élevées...
Pas très démocratique, tout ça. Mais question d'éducation.
Suel Burnous. Vous ne croyez pas si bien dire. Rimbaud fait mention dans une de ses lettres d'un père Suel qui l'employa à Aden (Pléiade oeuvres complètes).
Ca alors !
(Au fait, bibi c'est Dominique Q., de Lille...)
Il y a aussi dans le livre de Stevenson un éloge de la conversation, du pur plaisir de la conversation.
Je n'arrête pas en parcourant ce blog de tomber sur des choses qui font partie de mon univers. J'aurais par exemple juré que j'avais mis une note sur ce petit grand livre.
Il manque des liens sur les derniers commentaires... Bon d'accord, je vais m'abonner au fil.
merci Joël ! je me reconnais aussi souvent dans l'univers de vos "dernières nouvelles de l'homme" ...