la fiction comme alternative
Par cgat le jeudi 21 août 2008, 01:31 - écrivains - Lien permanent
La littérature invente de l'action fictive. De l'action fiction. De l'action en forme de fiction. La littérature est-elle capable alors d'inventer l'action future de l'espèce ? C'est cela l'ambition la plus totale. Inventer le futur de l'espèce. Littérature occupée à dire l'action future à faire par l'espèce. Aller jusqu'au bout : les actions futures à faire par les espèces qui pensent. Parce qu'il est presque certain que dans le futur seront créées plusieurs espèces à partir de l'espèce originelle homme. (…)
Comment faire de la fiction et comment faire de l'action, cela revient presque au même pour la pensée. Dit autrement : du point de vue de la pensée, faire de la fiction revient à égalité à faire de l'action et vice et versa. Parce que faire de l'action c'est toujours faire de la fiction. C'est juste une question de réglage de la temporalité. Il existe une couche chronologique où faire de la fiction s'apparentera à faire de l'action.
Est-ce cela le programme de cette branche de la littérature qu'est la science-fiction ? Non, parce que la science-fiction se préoccupe uniquement du côté fiction, même avec ce terme de science accolée devant. Non, parce que la science-fiction a choisi la forme désuète du roman, prétendre dire la fiction-action du futur avec cette forme est d'un anachronisme rédhibitoire. (…)
Cela sert à quoi la littérature occupée de la sorte ? Immédiatement, cela permet de fabriquer des fictions inédites, des fictions grandioses, et pendant longtemps. À terme, la fabrication de l'action du futur ça a tout de même de la gueule. La littérature sert à combler nos lacunes de connaissances, sert à créer de l'information inédite, que les autres disciplines de connaissance ne peuvent pas créer.
Dominiq Jenvrey, « La littérature doit s’occuper à fabriquer l’action du futur », TINA, 1, p. 125-127
(...même si je ne suis pas d'accord avec la généralisation du troisième paragraphe concernant la science-fiction...)
Dominiq Jenvrey publiera en octobre 2008, L’E.T., dans la collection « Déplacements » du Seuil.
Commentaires
"inventer le futur de l'espèce", la seule idée de faire partie d'un truc que l'on nomme "espèce" et dont on invente le futur me transforme en petite souris affolée - il est vrai qu'il ne s'agit que de fiction, alors ,n'en déplaise à l'auteur, j'en reste à la souris agacée et vexée.
Je crois que finalement la fiction m'intéresse moins que la forme qu'on lui donne
je comprends que la formulation provocatrice de Jenvrey puisse agacer et vexer, même si elle me séduit :
je dois lire trop de science-fiction !
La science-fiction, genre mineur sans oser le dire (paix à Ubik et à Kubrick), comme la littérature policière : les clichés ont la vie dure.
Mais ils résistent au temps (ils ont un fixateur de qualité). Certains livres de ces catégories ont même "de la gueule", croit-on distinguer dans l'obscurité.
de la gueule, tout à fait, Dominique !
je n'aime pas non plus voir à l'oeuvre (comme dans le texte de Jenvrey) cette notion de "genre mineur" ... à moins de la détourner en la "littérature mineure" qu'est toute littérature qui vaut la peine selon Deleuze